Havre de paix

Alors comme ça on meurt… comme ça je ne sais pas, et “on” est un con disait ma mère. Un rayon, que dis-je, une nappe soudain s’étale en tâches de lumières entre les sépultures, sur le béton et le pavé, sur les fleurs séchées et la mauvaise herbe. Profiter, oui, maintenant. Je lève le visage, me casse le cou. Je veux tout, donnez moi le soleil! Oui, toi! Sois aussi puissant qu’on le raconte, ordonne aux nuages épais de s’écarter pour te laisser réchauffer mes yeux, ma peau… Là comme un lézard, statufiée, un léger sourire aux lèvres, je m’enivre. Un bourdonnement hâtif près de mon oreille, les oiseaux qui se répondent … Bonheur de l’instant… souvenir des étés lointains. Je me tourne, derrière moi la tombe d’un Monsieur Adam, et sur elle pousse un lilas blanc. Je m’approche de l’arbre, tends une main avide vers une grappe fleurie pour y plonger amoureusement mon nez. Respire… un parfum vert… respire… une senteur anisée, oui, c’est ça, de l’anis. Mes yeux s’ouvrent et mes doigts pressent et caressent les fleurs fermes et délicates. Prodigieuse nature. Subitement le gris éclipse le rêve, traînant avec lui le vent glacé d’un mois d’avril capricieux. J’attendrai le prochain soleil. déjà mes yeux furètent et contemplent la mort enveloppée d’un désordre de pierres et de verdure.

Leave a comment